Journal La Terrasse - LOVETRAIN2020 d’Emanuel Gat, jubilatoire !
Après avoir triomphé à la Cité Musicale de Metz et avant de s’envoler vers New-York, le jubilatoire LOVETRAIN2020 d’Emanuel Gat fait escale à Chaillot.
Une « comédie musicale contemporaine ». Cette expression par laquelle Emanuel gat définissait sa pièce avant sa création prend tout son sens à la vue de LOVETRAIN2020. Pas de narration certes, mais une suite de tableaux solaires et entrainants qui enchaînent les standards de Tears for Fears. Vêtus de costumes que l’on pourrait dire grand siècle si leurs volumes n’étaient pas totalement déstructurés, quatorze formidables interprètes dialoguent de mille façons avec cette pop des années 1980 et c’est jubilatoire. Solos et duos répondent aux danses chorales comme le silence répond à la musique, l’immobilité au mouvement ou l’ombre à la lumière dans un équilibre savamment travaillé et subtil. S’envolant ou à terre, virevoltant ou courant, les danseurs et danseuses, chacun dans leur partition, sont les membres d’un même corps vibrant que les fumigènes viennent nimber d’un sfumato. La chorégraphie comme la lumière débordent du cadre et l’œil qui est sans cesse surpris ne peut se lasser et en redemande.
Une pièce chorégraphique, un film et une installation photographique
Il semble que dans le clan Gat le talent soit un don largement partagé et multiple. Thomas Bradley, non content d’être interprète de LOVETRAIN2020 en signe également les costumes somptueux. Costumes qui sont les héros du film Chaillot Parade présenté pour la première fois en première partie du spectacle à Chaillot. Leurs étoffes précieuses y répondent à la beauté graphique du lieu autant qu’ils y contrastent avec ses sous-sols secrets et bruts ou ses recoins techniques. La photographie signée Julia Gat – la fille d’Emanuel présente l’été dernier aux Rencontres d’Arles – y est superbe. À la Cité Musicale de Metz, c’est une installation photographique intitulée 2020 que l’on peut admirer jusqu’au 27 novembre. On y découvre deux séries d’instantanés pris en lumière réelle par le chorégraphe dans le sombre écrin du studio Cunningham de la Cité de la Danse à Montpellier. Capturés lors d’une résidence pour LOVETRAIN2020, les premiers dévoilent autant qu’ils nimbent de mystère le processus créatif dans un flou célébrant le mouvement. Issus de répétitions de The Goldlanbergs et faisant émerger corps et visages d’un noir intense, les seconds parent le mouvement d’une aura mystique. Tous sont d’une beauté picturale captivante.
Delphine Baffour